Puff Daddy largement acquitté : l’espoir vain d’une revanche finale contre les élites
Texte de Philippe Sauro Cinq-Mars
Les élites tombent depuis quelques années, mais il faudra quand même modérer nos attentes. Après des mois d’enquête, d’indignation publique, de révélations explosives, d’images sordides et de témoignages dévastateurs, Sean “Diddy” Combs a été en grande partie acquitté au terme de son procès fédéral. S’il a été reconnu coupable de deux chefs de transport inter-États à des fins de prostitution, les accusations les plus graves — notamment trafic sexuel, conspiration criminelle et extorsion (RICO) — ont été écartées par le jury, qui a jugé les preuves insuffisantes pour établir un réseau structuré. En attendant la sentence prévue à l’automne, Combs reste incarcéré, mais le verdict a largement amoindri la portée symbolique que devait avoir ce procès.
Un verdict qui, à la surface, choque. Et dans les cercles plus attentifs, désillusionne.
Diddy n’était pas qu’un musicien ou un magnat du divertissement : il était devenu, par la gravité des accusations portées contre lui, un symbole — celui d’un système corrompu, impuni, nourri à l’égocentrisme hédoniste, protégé par les réseaux du pouvoir. Sa chute était attendue comme une purification. Son procès, un moment de vérité. Et pourtant.
Ceux qui espéraient que les abus les plus grotesques des élites culturelles seraient enfin mis à nu, que les noms tomberaient, que les ramifications seraient révélées, repartent avec le goût amer d’un éternel recommencement. Tout se passe comme si, à chaque époque, l’histoire nous accordait un frisson de justice, une illusion de redressement — avant que la poussière ne retombe, que le rideau ne se referme, et que le théâtre des puissants ne reprenne.
La fin d’un système, et non son apogée
Harvey Weinstein est tombé. Epstein est mort. Ghislaine Maxwell est en prison. Des carrières entières ont été ruinées, et l’aura mystique de la célébrité s’est effondrée dans un océan de ridicule, de tweets maladroits et de révélations sordides. Les figures d’autorité culturelle — producteurs, journalistes, réalisateurs, chroniqueurs — ne règnent plus sans partage sur les imaginaires. Les studios eux-mêmes chancellent, Disney rétrécit, les Oscars ne font plus rêver.
Hollywood n’est plus une cathédrale : c’est un centre commercial en faillite, à côté duquel TikTok a plus d’influence. Le rêve américain, version tapis rouge, est devenu un mauvais feuilleton. Alors bien sûr, il reste du vice, de la violence, du chantage, des secrets. Il y en aura toujours. Mais cela ne constitue plus une structure cohérente et indéboulonnable. Ce sont des épiphénomènes du chaos mondial, pas des piliers cachés du pouvoir.
Le fantasme d’un axe du mal
L’idée qu’il existerait une « liste » dont la révélation renverserait tout — Trump, Biden, Hollywood, l’ONU, les Rothschild et les studios Pixar — tient aujourd’hui plus de la […]