Pride fatigue : un terme qui veut tout dire en ce mois des « fiertés »
Article d'Anthony Tremblay
En cette fin de printemps chaude et humide, il faut dire que le mois des fiertés a perdu de sa visibilité. Si certaines entreprises, telles qu’Air Canada, ou des administrations publiques mettent toujours de l’avant le drapeau arc-en-ciel, l’Occident semble néanmoins frappé par ce que l’on appelle la Pride fatigue, un terme anglais désignant une lassitude face à la surenchère de la fierté.
Les entreprises se montrent plus frileuses que d’habitude cette année. Celles qui, autrefois, embrassaient toutes les causes sociétales — des LGBT à Black Lives Matter — semblent avoir revu leur stratégie estivale. Si quelques-unes ont souligné le mois des fiertés, comme Air Canada, cela a surtout suscité des railleries.
L’Agence du revenu du Canada, dans une publicité diffusée sur Facebook, mettait en scène un couple homoparental pour encourager les parents à demander les allocations familiales. Ce fut suivi de nombreux commentaires homophobes. Bien que le fait de cibler des individus pour leur orientation sexuelle soit inacceptable, cette réaction traduit une forme de fatigue, un ras-le-bol face à ce qui est perçu comme l’agenda LGBT.
C’est un peu le même phénomène que pour la présence, très marquée, de femmes voilées dans la publicité. Ce n’est pas la diversité en soi qui dérange, mais le fait que les agences de publicité semblent désormais contraintes de cocher des cases : tel pourcentage de couples mixtes, telle proportion de femmes voilées ou d’hommes sikhs portant le turban.
Encore une fois, ce n’est pas la présence de ces personnes qui est remise en question, mais le caractère artificiel de leur mise en avant. Cela sonne faux. Prenons l’exemple du cinéma : personne ne s’est plaint, à l’époque, de la production des films Blade avec Wesley Snipes. Ces films étaient appréciés, bien avant que la logique des quotas ne vienne s’imposer.
De la même manière, de nombreux acteurs homosexuels ont pu incarner de grands rôles sans que cela ne pose problème. Ce qui dérange aujourd’hui, c’est que l’on ne semble plus rechercher la qualité, mais la quantité de cases à cocher. Et cette Pride fatigue résume bien cette dérive.
Nous connaissons tous des personnes homosexuelles, trans ou bisexuelles. Cela ne devrait déranger personne. Mais peut-on s’arrêter un instant et se demander si l’intégration de personnages définis uniquement par leur orientation sexuelle, sans que cela ait de lien avec l’intrigue, n’est pas devenue fatigante, voire contre-productive pour tous [...]