Le retour du GNL au Québec : la Côte-Nord relance le débat que Québec voulait enterrer
Texte de Philippe Sauro Cinq-Mars
Contre toute attente, la saga du gaz naturel liquéfié au Québec semble prête à connaître un second souffle. Selon une enquête publiée par Alexandre Shields dans Le Devoir le 4 juillet, l’entreprise Marinvest Energy propose de construire une usine de liquéfaction et un terminal maritime d’exportation sur la Côte-Nord, un projet aussi ambitieux que feu GNL Québec. Appuyé par une filiale canadienne de l’entreprise norvégienne Marinvest, le projet prévoit également un gazoduc de plusieurs centaines de kilomètres pour acheminer le gaz de l’Ouest canadien vers Baie-Comeau — possiblement jusqu’en milieu marin, dans le secteur de la baie des Anglais.
La nouvelle a de quoi raviver les passions, tant elle ressemble à un remake du projet avorté de GNL Québec, à ceci près que cette fois, le gouvernement Legault semble disposé à considérer sérieusement le projet.
Le pragmatisme revient par la bande
Alors que le Québec maintient un moratoire idéologique sur l’exploitation de son propre sous-sol gazier, voilà qu’un projet venu d’Alberta et de Norvège pourrait relancer l’un des rares dossiers économiques d’envergure qui, s’il avait été traité avec cohérence, aurait pu faire du Québec une plaque tournante énergétique transatlantique. Le projet de Marinvest Energy, tel que décrit par Le Devoir, viserait à implanter directement dans le Saint-Laurent une usine flottante de liquéfaction — une technologie déjà maîtrisée ailleurs — pour ensuite charger les méthaniers à Baie-Comeau, dans une infrastructure portuaire partiellement existante.
Le gaz naturel proviendrait du réseau de TC Energy via un nouveau gazoduc traversant le territoire québécois. C’est la même colonne vertébrale que celle du projet Gazoduq, auquel Ottawa et Québec avaient dit non, à coups de rapports biaisés et d’invocations morales sur la « transition énergétique ».
Le contexte, cependant, a changé. En 2025, la crise énergétique européenne est loin d’être résolue. La guerre en Ukraine, les hausses de prix de l’électricité, les ruptures d’approvisionnement et le retour au charbon dans plusieurs pays ont démontré l’irréalisme des objectifs de décarbonation. Le gaz naturel — quoi qu’en disent les militants — demeure la seule alternative crédible à court et moyen terme pour remplacer les hydrocarbures plus polluants.
Greg Cano, chef de l’exploitation de Marinvest Energy Canada, n’est pas un inconnu. Il a piloté le controversé gazoduc Coastal GasLink qui alimente LNG Canada, méga-projet de liquéfaction situé en Colombie-Britannique. Dans un courriel cité par Le Devoir, Cano affirme que « le Québec peut jouer un rôle clé dans la diversification des options d’exportation pour le gaz naturel canadien », en particulier à une époque où « dépendre uniquement du marché américain présente des défis croissants ».
L’incohérence gouvernementale à nu
Le projet GNL Québec avait été torpillé pour des raisons purement politiques. Le Bureau d’audiences publiques sur […]